Appel à communications – Journée d’études / contributions (archives)

Cet appel à contributions s’adresse uniquement aux jeunes chercheurs

 Appel à communications pour le 25 avril 2017, numéro 8, Traits-d’Union

Fertilisations croisées dans les arts, médias et langues

Journée d’études, Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, Maison de la Recherche, 4 rue des Irlandais, 75005, Paris, le 22 juin 2017.

Tisser, créer des liens, converger, grâce à des « fertilisations croisées[1]». À partir de ce postulat, il est possible de s’interroger sur les dynamiques de production qui mêlent différentes formes artistiques, médias ou langues, afin de transgresser les limites pour une transformation et une réinvention des genres. L’entre-deux et les zones de contact provoquent-ils des frictions et des tensions intrinsèques à la création ? Dans ce contexte, il devient essentiel de distinguer plusieurs concepts qui tendent à se confondre : la pratique de l’intermédialité par exemple, s’applique à la « combinaison de médias », à la présence de deux médias au sein d’un même support, ou encore à la « transposition médiatique » et aux « références intermédiales[2]». D’autre part, la transmédialité s’attarde sur la relation entre différents médias indépendants, mais également entre différents genres ou différentes disciplines. À travers des pratiques « inter-», « trans-», ou « pluri-», il ne s’agit pas d’uniformité, mais bien de transcendance, de différence, de conflits malgré les convergences qui ont toujours existé entre les différentes formes d’expression.

Le huitième numéro de Traits-d’Union et la journée d’études associée, cherchent à interroger, à l’image même de la nature transdisciplinaire de la revue, les logiques des productions aux carrefours des genres non seulement de l’ultra contemporain, mais aussi selon une vision diachronique. Comment se produit le sens ? Ces pratiques artistiques visent-elles d’autres sens ou sensations, de par leur caractère « multimédial » ou « multimatériel » ? Quelles relations existent entre la matière et l’idée ? Dans quelle mesure les démarches trans ou intermédiales font-elles preuve d’une situation frontalière (culturelle, linguistique, géographique, etc.) ? Ces conditions ont-elles une répercussion sur des thématiques, peut-être de prédilection, ou s’agit-il là plutôt de poétiques ? Et finalement, vivons-nous actuellement un moment clé de la production de l’être-entre, comme cela avait été déjà le cas pour les pratiques artistiques des avant-gardes ?

Le comité de sélection s’intéressera particulièrement, mais non exclusivement, aux propositions traitant des questions suivantes :

– Dans le domaine littéraire, l’emprunt à d’autres formes artistiques et médiatiques peut se faire de manière suggestive et allusive. Les correspondances entre les arts se manifestent à travers des échos synesthétiques ou des rhétoriques polyphoniques qui interrogent le rapport de l’être au monde, de manière sensible avec la mobilisation des sens. Par ailleurs, la relation réciproque entre texte et image a été et continue d’être l’apanage des chercheurs. La création d’images s’applique d’ailleurs aussi bien à la peinture, qu’à la photographie, le cinéma, etc. Barthes dit ainsi « Toute description littéraire est une vue[3]», insistant sur l’analogie entre le texte et le visuel. Les notions de transmédialité, multimédialité et intermédialité sont en outre définies par Simon Morley[4] s’intéressant à la relation de transposition entre mots et images dans l’art du XXe siècle, où cohabitent dans un même espace les deux modes d’expression. Le lien entre peinture et littérature s’illustre aussi grâce à la pratique de l’ekphrasis. Les deux modes d’expression ont souvent été confrontés à travers l’Histoire[5] et les dialogues entre ces disciplines sont loin d’être récents. Les croisements peuvent être analysés lorsque les lacunes de l’un sont compensées par l’autre, lorsque les outils du peintre ou ceux de l’écrivain se mêlent au sein d’une œuvre. La question de l’intermédialité est d’ailleurs une branche essentielle dans la recherche comparatiste, s’intéressant aux carrefours des formes artistiques.

– Au théâtre, nombreuses sont les mises en scènes qui utilisent l’intermédialité, une pratique qui est courante depuis les années 1960 mais qui a augmenté au cours des années 1980-1990. Le théâtre se caractérise en réalisé par sa plurimédialité et nous pourrions nous demander si l’ajout de supports (les moyens matériels tels que les caméras, écrans, ou encore portables) enrichit uniquement l’esthétique mais aussi les thématiques. Quelles sortes d’expériences sensorielles sont offertes au public et quelles sont les répercussions des médias sur l’espace théâtral, scénique ou dramatique ?

– Ces questions s’appliquent aussi au domaine cinématographique, alors qu’une multitude de recherches se sont focalisées sur la relation entre littérature et cinéma, sur l’écriture filmique, sur le passage du roman au cinéma ou sur les références croisées. Depuis quelques années, nous constatons une nouvelle contrainte dans les films ou dans des séries télévisées : comment incorporer de manière naturelle les messages écrits ou visuels qui ponctuent désormais notre quotidien grâce à la nouvelle technologie et l’usage des applications[6] ? Face à une époque médiatisée, peuplée de divers dispositifs qui nous (inter)connectent et interviennent dans notre perception du monde, de plus en plus d’artistes, ainsi que les sociétés de production, inscrivent leur travail dans une logique trans- ou intermédiale. Un produit médiatique n’existe que très rarement dans une seule forme. Par exemple, outre le fait qu’une série télévisée n’est plus seulement diffusée à la télévision mais aussi sur internet et en streaming, une partie du récit n’est pas forcément contenu dans des épisodes mêmes. Henry Jenkins, notamment, dénomme et décrit le phénomène de « Transmedia Storytelling » par laquelle une partie du récit d’une série télévisée ou d’un film peut être racontée dans d’autres formats et à travers plusieurs plateformes (des clips ou mini-épisodes sur YouTube ou des images postés sur les réseaux sociaux[7]). L’intérêt du public est de plus en plus sollicité, immergé dans l’environnement médiatique grâce aux innovations technologiques avec les enjeux sociaux et commerciaux. Or, compte tenu du temps passé sur les appareils, le quotidien implique une interaction transmédiale constante, et ainsi un brouillage de frontières entre la réalité et l’univers médiatique[8].

– Pourtant, ce ne sont pas seulement les sphères capitalistes qui s’emparent de cette logique : beaucoup d’artistes ne se contentent plus d’utiliser un seul support pour leurs créations et étendent ainsi leurs œuvres à travers plusieurs supports médiatiques. Sur une échelle mono-support, c’est à dire en adoptant une démarche intermédiale, les artistes font aussi converger au sein d’un seul support plusieurs médias, comme les romans de W.G. Sebald, constitués de texte et de photographies. Ces œuvres se situent donc dans une zone qui interroge les genres institutionnels. Ces manifestations transgressent par leurs fonctionnements inter- ou transmédiaux, ne se contentant pas de produire dans les cadres institutionnels de leur aire artistique, mais utilisent d’autres langages artistiques via leurs esthétiques, logiques et dynamiques. Elles émergent dans des zones frontalières et constituent à eux un borderland, ou, comme le nomme Mariniello, un « milieu intermédial[9]». Ce sont ainsi des « poétiques trans-[10]» qui se développent. L’intermédialité peut être analysé à partir de « calculs et d’évaluations, de situations et de rapports de puissance, de fabrication de présence et d’effets d’immédiateté[11]. »

– Les fertilisations croisées dans les langues se manifestent par exemple lorsque le langage est conditionné par le support : sous la pression de la technologie et du marché, le langage relatif aux SMS s’est développé. Dans quelle mesure le support définit-il le langage ? Pourquoi le langage sur un blog serait-il différent de celui d’un chat, alors qu’il s’agit du même support ? Que se passe-t-il lorsque l’on déplace ce langage numérique vers un autre support, lorsqu’un blog est transposé vers un livre ? De nos jours, peut-on parler d’un déplacement de la langue vers un langage visuel, avec l’usage de l’émoticon ? Dans quel contexte médiatique et langagier est-il admis ou nécessaire ? Comment, par l’absence de la voix, les utilisateurs doivent passer par des moyens visuels, des stratégies de méta-commentaires ? Finalement, le choix de la langue elle-même, lors de l’énonciation, produit des fertilisations. Comment le plurilinguisme qui se tisse au sein des textes ou cultures, devient-il le support d’une élaboration identitaire ou artistique et questionne les cadres traditionnels de l’apprentissage ? Pourrait-on parler d’une poétique de l’étrangeté ? Que provoque le plurilinguisme au sein d’une société, d’une œuvre d’art ?

– Enfin, comment se construisent au fil de l’Histoire des ponts ou des passerelles, grâce à des rencontres et des lieux d’hybridation qui traduisent des transferts culturels ? Par exemple, de nombreux projets transmédiaux cherchent à raconter l’Histoire – c’est le cas en Amérique latine, avec le « Proyecto Walsh » de Álvaro Liuzzi, qui reprenait, avec l’usage de la première personne et en temps réel, les faits historiques du premier roman de non-fiction Operación masacre de l’argentin Rodolfo Walsh via le réseau social Twitter, de 2010 à 2011. En ce moment, sur Twitter, un autre projet est développé pour commémorer les 200 ans du croisement des Andes par le libertador San Martín, qui a libéré l’Argentine, le Chili et le Pérou de la Couronne Espagnole en 1817. Pourquoi de plus en plus de projets cherchent à rendre accessible l’Histoire à travers des stratégies transmédiales ? Il en va de même pour de nombreux musées, qui mettent en œuvre des parcours transmédiaux. Est-ce par soucis pédagogique ou pour attirer un nouveau public ? Peut-on réellement transmettre l’Histoire de cette manière ? Ces pratiques croisées permettent-elles de reconnaître l’altérité, de voir de l’autre côté, d’être des deux côtés, de construire des ponts, qui peuvent d’ailleurs être conflictuels ?

Pour envoyer une proposition à la Journée d’études et pour le numéro 8 :

Les propositions de communications, sous forme d’abstracts (500 mots +/- 10 %, hors bibliographie), en langue française, accompagnées d’une courte notice biographique, sont à envoyer pour le 25 avril 2017 par courriel, au format .doc, à contact@revuetraitsdunion.org.  La Journée d’études aura lieu le 22 juin 2017.

Pour information, une sélection des articles sera publiée. Les articles retenus devront comprendre dans leur version finale environ 30 000 caractères +/- 10 %, espace compris, et seront à envoyer pour le 6 juillet 2017 (une deuxième sélection aura lieu à partir des articles complets).

Pour envoyer une proposition pour le numéro 8 uniquement :

Les propositions d’articles, sous forme d’abstracts (500 mots +/- 10 %, hors bibliographie), en langue française, accompagnées d’une courte notice biographique, sont à envoyer pour le 25 avril 2017 par courriel, au format .doc, à contact@revuetraitsdunion.org.

Pour information, les articles retenus après une première sélection par le comité scientifique devront comprendre dans leur version finale environ 30 000 caractères +/- 10 %, espace compris, et seront à envoyer pour le 6 juillet 2017 (une deuxième sélection aura lieu à partir des articles complets).

Comité d’organisation : Alice Burrows, Florelle Isal, A’icha Kathrada, Gianna Schmitter et Anne Sweet.

Comité scientifique : 

Mariana Di Cio, Maîtresse de conférences à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, école doctorale 122, Centre de Recherche Interuniversitaire sur l’Amérique Latine (CRIAL)

Cécile Camart, Maîtresse de conférences à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, école doctorale 267 (LIRA).

Emmanuelle Garnier, Professeur à l’Université Toulouse Jean-Jaurès, directrice du laboratoire de recherche transdisciplinaire LLA-CRÉATIS : Lettres, langages et Arts – Création, Recherche, Émergence, en Arts, Textes, Images, Spectacles 

Charlotte Gould, Maîtresse de conférences, école doctorale 514, Langues, Textes, Arts et Cultures du Monde Anglophone (PRISMES)

Raphaëlle Moine, Professeure à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, école doctorale 267, Institut de recherche sur le cinéma et l’audiovisuel (IRCAV)

Danièle Moore, Professeure à l’Université Simon Fraser – Paris 3, école doctorale 268 et l’Université Simon Fraser, Canada.

Clíona Ní RIORDAIN, Professeure à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, école doctorale 514, Langues, Textes, Arts et Cultures du Monde Anglophone (PRISMES)

Fabrice ROCHELANDET, Professeur à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, école doctorale 267 (ICRAV)

Arnaud RYKNER, Professeur à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, école doctorale 267 (IRET).

Christilla VASSEROT, Maîtresse de conférences à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, école doctorale 122, Centre de Recherche Interuniversitaire sur l’Amérique Latine (CRIAL)

Bernard VOUILLOUX, Professeur à l’Université Paris-Sorbonne (Paris IV), UFR de littérature française et comparée

Mots clés : interférences, tensions, conflits, zones de contact, convergences, connexions, rencontres, synergie, dimension interactive, collaborative et sociale, hybridité, interdisciplinarité, transdisciplinarité, plurilinguisme, transmedia, intermédialité.

[1] Ce concept provient de l’auteur argentin, Reinaldo Laddaga, qui s’interroge sur « l’accroissement des communications » et qui analyse ainsi des « “[…] croisements possibles, ainsi appelés la ‘fertilisation croisée’, des ‘transferts structurels’ d’un champ à l’autre, des conversations, les collaboration, les prêts, les amitiés, le tissage de désirs et de compétences, le bricolage d’idées et de productions” qui, dans son assemblage, devraient viser la création d’une forme particulière de développement subsistant. », notre traduction, Reinaldo Laddaga, Estética de la emergencia – La formación de otra cultura de las artes, Buenos Aires, Adriana Hidalgo Editora, 2006, p. 94.
[2] Voir à ce sujet Irina Rajewsky, Intermedialität, Tübingen, Bâle, Francke Verlag, 2002, p. 15-16
[3] Roland Barthes, S/Z dans Œuvres complètes, tome III, Paris, Éd. du Seuil, 2002, p. 61.
[4] Simon Morley, L’Art, les mots, Paris, Hazan, 2003.
[5] Voir à ce sujet Daniel Bergez, Littérature et Peinture, Paris, Armand Colin, 2004.
[6] Voir à ce sujet, cette vidéo instructive sur la plateforme YouTube : https://www.youtube.com/watch?v=uFfq2zblGXw
[7] Voir à ce sujet, « Transmedia Storytelling 101 » sur le blog officiel d’Henry Jenkins, « Confessions of an Aca-Fan », 22 mars 2007,
http://henryjenkins.org/2007/03/transmedia_storytelling_101.html. [Page consultée le 28 mars, 2017].
[8] Josefina Ludmer parle de « réalitéfictions » (realidadficciones) pour se référer à ce brouillage entre réalité et fiction inhérent à notre monde hyperconnecté (cf. Aquí America latina: una especulación, Buenos Aires, Eterna Cadencia, 2011).
[9] Silvestra Mariniello, « Cambiar la tabla de operación. El medium intermedial » (« Changer la table d’opération. Le médium intermédial »), Acta Poética, vol. 30, nº2, 2009, http://www.scielo.org.mx/scielo.php?script=sci_arttext&pid=S0185-30822009000200004, [Page consultée le 28 mars, 2017].
[10] Miriam Chiani, « Poéticas Trans » in Escrituras compuestas : Letras/ Ciencia/ Artes. Sobre Silvina Ocampo, Arturo Carrera, Juana Bignozzi y Marcelo » (« Poétiques Trans » in Écritures composées : Littératures/ Sciences/ Arts. Sur Silvina Ocampo, Arturo Carrera, Juana Bignozzi et Marcelo), Buenos Aires : Katatay, 2014.
[11] Éric Méchoulan, « Intermédialités : le temps des illusions perdues » in Intermédialités : histoire et théorie des arts, des lettres et des techniques, vol. 1, 2003, p. 10-13.

Appel N8

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